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Le Capitaine Mandibule les conduisit à travers un dédale de racines et de cailloux qui semblaient gigantesques pour leur taille désormais minuscule. Ils arrivèrent finalement devant une fourmilière impressionnante dont l’entrée était décorée de petites pierres colorées et de brindilles sculptées.

« C’est ici que vit Maître Formix, la plus sage des fourmis du jardin, » expliqua le Capitaine. « Si quelqu’un peut nous aider à vaincre Dame Hésita, c’est bien lui. »

Ils entrèrent dans la fourmilière, descendant par des tunnels parfaitement organisés jusqu’à une grande chambre centrale. Là, assis sur un trône fait de pétales de fleurs séchées, se trouvait une fourmi plus grande que les autres. Elle portait une écharpe rouge et tenait un bâton fait d’une épine de rose.

« Capitaine Mandibule, » dit Maître Formix d’une voix calme et profonde. « Je t’attendais. Et je vois que tu as amené les deux jeunes humains dont parlent toutes les coccinelles messagères. »

Baptiste fut surpris. Les nouvelles voyageaient vite dans ce monde miniature !

« Maître, » commença le Capitaine, « Dame Hésita a défié ces enfants. Ils doivent jouer avec mon équipe lors du grand tournoi, mais… »

« Mais le petit aux lunettes a aussi peur de l’échec que tes joueurs, n’est-ce pas ? » termina Maître Formix en regardant Baptiste avec bienveillance.

Baptiste rougit et baissa la tête. La fourmi sage s’approcha de lui et posa une antenne sur son épaule.

« Regarde-moi, jeune Baptiste, » dit-elle doucement.

Baptiste leva les yeux et fut surpris de voir tant de gentillesse dans les yeux composés de l’insecte.

« Sais-tu pourquoi nous, les fourmis, réussissons toujours à construire nos fourmilières, même quand elles sont détruites ? »

Baptiste secoua la tête.

« Parce que nous n’avons pas peur d’échouer. Chaque fourmi qui transporte une miette sait qu’elle peut la faire tomber. Chaque tunnel que nous creusons peut s’effondrer. Mais nous continuons, encore et encore. »

Maître Formix fit signe à Baptiste de le suivre jusqu’à un petit bassin d’eau claire au centre de la pièce.

« Regarde, » dit-il en pointant la surface de l’eau.

Dans le reflet, Baptiste ne vit pas son visage habituel. À la place, il vit des images de lui-même : Baptiste essayant de grimper à un arbre et tombant, Baptiste tentant de faire du vélo sans les petites roues et perdant l’équilibre, Baptiste essayant de lire un livre difficile et abandonnant après quelques pages.

« Ce sont tes échecs, » dit Maître Formix. « Mais regarde encore. »

L’eau ondula et de nouvelles images apparurent : Baptiste réussissant finalement à monter sur la première branche de l’arbre, Baptiste pédalant fièrement sur son vélo, Baptiste lisant avec confiance.

« Et ce sont tes réussites, » continua la fourmi. « Remarques-tu quelque chose ? »

Baptiste réfléchit un moment. « Les réussites… viennent après les échecs ? »

Maître Formix sourit (autant qu’une fourmi peut sourire). « Exactement ! L’échec n’est pas l’opposé de la réussite, c’est une partie du chemin vers la réussite. »

La fourmi sage se dirigea vers une étagère et en sortit une petite fiole contenant un liquide doré.

« Ceci est du nectar de persévérance, » expliqua-t-il. « Les abeilles le fabriquent en visitant des milliers de fleurs, même quand le vent les repousse ou que la pluie les mouille. Je veux que tu en prennes une goutte. »

Baptiste accepta la fiole et but une minuscule gorgée. Immédiatement, une chaleur agréable se répandit dans tout son corps.

« Maintenant, » dit Maître Formix, « je vais te montrer comment jouer au football sans craindre l’échec. »

La fourmi les conduisit dans une salle adjacente où un petit terrain de football avait été aménagé. Des dizaines de fourmis s’y entraînaient, passant une graine ronde d’une fourmi à l’autre avec une précision impressionnante.

« Les fourmis ne sont pas naturellement douées pour le football, » expliqua Maître Formix. « Nos pattes ne sont pas faites pour ça. Mais nous nous sommes entraînées, encore et encore. »

Il fit signe à Baptiste de rejoindre le jeu. Hésitant d’abord, le garçon s’avança sur le terrain. Une fourmi lui passa la balle-graine, qu’il rata complètement.

« Ce n’est pas grave, » dit Maître Formix. « Essaie encore. »

Baptiste essaya à nouveau, et cette fois-ci, il réussit à arrêter la balle avec son pied. Franck l’encourageait depuis le bord du terrain :

« Tu vois, Baptizte ! Tu peux le faire ! »

Après une heure d’entraînement avec les fourmis, Baptiste réussit à faire plusieurs passes correctes et même à marquer un but. Ce n’était pas parfait, mais il progressait.

« Tu vois, » dit Maître Formix alors qu’ils se reposaient, « tu as raté beaucoup de passes aujourd’hui, mais tu as aussi réussi beaucoup de choses. C’est ainsi qu’on apprend. »

Baptiste hocha la tête, comprenant un peu mieux. « Mais Dame Hésita est si puissante… Comment pouvons-nous la vaincre ? »

« Dame Hésita tire sa force de votre peur, » répondit la sage fourmi. « Plus vous avez peur d’échouer, plus elle devient forte. Mais chaque fois que vous essayez malgré votre peur, elle s’affaiblit un peu. »

Maître Formix donna à Baptiste une petite amulette en forme de fourmi. « Garde ceci avec toi. Quand la peur te paralysera, serre-la dans ta main et rappelle-toi : même les fourmis trébuchent, mais elles se relèvent toujours. »

Baptiste attacha l’amulette autour de son cou, sentant déjà un peu plus de courage en lui.

« Maintenant, » conclut Maître Formix, « retournez auprès des Scarabées Brillants. Ils ont besoin de vous pour retrouver leur confiance. Le tournoi approche, et Dame Hésita ne vous facilitera pas la tâche. »

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